Le magazine étasunien “Time” a décerné il y a peu son traditionnel prix de
la personne de l’année au « Manifestant », englobant ainsi les
différents mouvements sociaux contestataires qui ont vu le jour autour du globe
en 2011. Parmi les figures que le magazine met en avant on retrouve forcément plusieurs
leaders des manifestations au Moyen et Proche Orient comme Mohamed
Bouazizi (Tunisie) ou Ahmed Harara (Egypte), mais aussi des participants aux
mouvements en Europe et aux Etats-Unis. Cependant, dans cette liste de noms se
trouve un Mexicain qui mène un combat différent: Javier Sicilia, l’écrivain, poète
et journaliste qui a lancé le « Mouvement Pour la Paix avec Justice et
Dignité », afin de matérialiser le ras le bol général du peuple face à la
violence engendrée par le Narco (et la guerre lancée en représailles par le
président Calderón).
Il faut dire que la lutte de Javier Sicilia provient initialement de
raisons purement personnelles : son fils a été retrouvé mort avec des
signes apparents de torture, le 28 Mars dernier dans la ville de Cuernavaca, en
compagnie de 6 autres cadavres. La raison serait une simple dispute dans un
bar, dont le gérant Julio de Jesús Radilla Hernández, connu comme « El
Negro Radilla » aurait offert 300,000 pesos (moins de 17,000 euros) et 2
automobiles à un chef Narco local pour éliminer les 6 jeunes de peur de
représailles légales.
Depuis, le poète Mexicain est la figure de proue du mouvement du peuple
contre le Narco. Il a organisé une marche nationale pour la Paix, immédiatement
soutenue par de nombreuses associations civiles dans tout le pays, et même par
l’EZLN (Armée Zapatiste de Libération Nationale) du Sous-commandant Marcos. Il est de toutes les négociations, et il a amené les
représentants des principaux partis politiques, de l’influente Eglise
Catholique, les entrepreneurs et les syndicats à signer un Pacte pour la Paix
(qui a été signé á Ciudad Juarez, ville tristement célèbre pour être la plus
sanglante du pays).
Sicilia explique, dans son entretien au Time, avoir « été entrainé
dans un tourbillon médiatique auquel il n’était pas préparé », et explique
«l’importance pour lui de mettre un nom sur un mouvement jusqu’alors flou, afin
de pouvoir combattre l’impunité et la corruption non seulement du Narco mais
aussi du Gouvernement. » Il ajoute que le Mouvement est du «à la réaction de son cœur face à la mort de
son fils bien plus qu’au printemps Arabe » et termine l’entretien en se
comparant « á Ulysse essayant de rentrer chez lui, entre les monstres et
les obligations morales »
Dernièrement, le Mouvement Pour la Paix a été victime du Narco,
qui n’hésite plus à s’attaquer aux membres de l’Organisation : au moins 3
activistes ont été retrouvés assassinés lors des 2 derniers mois, dans les
Etats de Sonora et Michoacán.